C’est le résultat d’une étude réalisée par la Fondation Vinci Autoroutes et la Fondation MAIF, menée sur 60 conducteurs. Elle révèle une perte de vigilance, mais aussi un risque important au moment de la reprise du contrôle par l’humain. Attention donc !
Trois groupes de 20 de conducteurs comptant autant de femmes que d’hommes, rassemblés par tranches d’âge (20-30 ans, 40-50 ans et plus de 60 ans) ont été testés sur un simulateur de conduite. Il s’agissait de reproduire un trajet autoroutier de 53 km à une vitesse de 110 km/h.
Le point de départ était une aire d’autoroute et le lancement se faisait sans aide à la conduite. Au kilomètre 10, les deux assistances citées plus haut devaient être activées, les conducteurs pouvant reprendre le contrôle s’ils l’estimaient nécessaire.
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Scénario 1 : au 23e km, un camion suivi sur la voie de droite se déporte sur la voie de dépassement pour contourner une zone de travaux. Le système d’assistance à la conduite ne détectant pas cette zone, l’automobiliste doit reprendre le contrôle de son véhicule, circulant à 110 km/h, pour éviter les cônes et le fourgon d’intervention. Ce scénario a pour objectif de tester la réactivité des conducteurs lorsqu’ils délèguent une fonction à un système d’assistance à la conduite (ici la régulation de la vitesse et de la distance inter-véhicule).
Scénario 2 : au 43e km, sur une voie présentant une courbe, le sujet est averti par messages visuels puis sonores de la désactivation par décision du véhicule du mode automatique de maintien dans la voie de circulation, et doit reprendre la main pour maintenir sa trajectoire. Ce scénario a pour but d’évaluer l’effet que peut avoir la confiance dans les systèmes d’assistance à la conduite sur la distraction et l’hypovigilance des conducteurs.
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Des temps de réaction plus longs et une baisse du niveau d’éveil en condition d’assistance à la conduite
Quel que soit le système d’assistance, lorsqu’une fonction de conduite est déléguée au véhicule, les temps de réaction, en cas de besoin de reprise en main par le conducteur, sont plus que doublés par rapport à une conduite sans assistance. Ainsi, en mode de régulation de la vitesse et de la distance inter-véhicule, le temps de réaction est de 2,2 secondes en moyenne, soit 67 mètres parcourus à 110 km/h ; c’est-à-dire 30 mètres de plus que pour un temps de réaction normal (compris entre 1 et 1,5 seconde). En cas de désactivation du système de maintien dans la voie de circulation (scénario 2), le temps de reprise en main du véhicule en toute sécurité (c’est-à-dire le délai entre l’action sur les commandes du véhicule après alerte et le réajustement complet de sa trajectoire) est de 4,5 secondes en moyenne, soit plus de 130 mètres parcourus (et jusqu’à 6 secondes pour les personnes de plus de 60 ans). Malgré les alertes visuelles puis sonores, ce délai important peut être le signe d’un manque d’attention et d’un état d’hypovigilance du conducteur liés à la conduite semi-assistée. Les mesures de somnolence (objective – puissance spectrale des oscillations cérébrales – et subjective – échelle de mesure du niveau de fatigue de Karolinska) indiquent d’ailleurs une baisse de l’éveil dès 10 minutes, soit 2 fois plus rapide qu’en conduite sans assistance(1) pour l’ensemble des conducteurs.
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Des réflexes pas toujours adaptés pour éviter les situations à risque
L’analyse des trajectoires et des actions sur les commandes (volant, frein, accélérateur) a montré des réflexes inappropriés : plus d’1 conducteur sur 4 (27 %) a donné un coup de volant dans le mauvais sens. Dans le scénario 1, ces réflexes n’ont pas permis aux conducteurs d’éviter la zone de travaux : plus d‘1 conducteur sur 3 (35 %) est entré en collision avec des cônes de balisage et 10 % avec le fourgon d’intervention situé en aval. Dans le scénario 2, les conducteurs ne sont pas parvenus à maintenir une trajectoire optimale pour leur sécurité et celle des autres usagers de la route (en moyenne, les véhicules se sont déportés de 1,25 mètre).
« Les résultats de cette étude montrent à quel point une action motrice qui demande une planification et exécution complexe peut nécessiter un temps long lorsque le cerveau doit d’abord se désengager d’autres tâches dites de distraction », explique le professeur André Dufour, directeur du Ci2N de Strasbourg.
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D’ici à l’arrivée des véhicules entièrement autonomes (niveau 5), il faut être conscient que les systèmes de conduite semi-automatisée (niveau 2 à 3 pour les plus évolués actuellement sur le marché) ne dispensent pas le conducteur d’être vigilant. Il faut être capable de reprendre le volant à tout moment avec les réflexes appropriés. Faire des pauses régulières pour maintenir sa réactivité au meilleur niveau reste important, et il est déconseillé d’utiliser ces aides dans des secteurs à risques tels que des zones de travaux.